La manière significative dont l'information sur la violence contre les femmes par exemple est traitée dans les journaux, LA CONTIENT DÉJÀ ELLE-MÊME EN GERME ; exemple : une jeune femme enceinte étranglée par son mari.. et, je cite Midi-Libre :
"...on va savoir (après la conférence de presse accordée par le Procureur) les raisons (!) qui ont déclenché (!) ce geste (!) qui a irrémédiablement détruit une famille (!). Le petit garçon de 4 ans qui a perdu sa maman (!) et dont le père risque (!) d'être conduit en détention à été pris en charge par la DDASS." (!!!) Cinq coups en rafale serrée. Sonnée je suis.
1 le mot "raison" sous entend qu'il y a une cause DUELLE ou neutre, (ce sac trop lourd est la raison ou la cause de mon lumbago) : la victime est ainsi mise dos à dos avec son étrangleur ! PIRE: ON CHERCHE D'EMBLÉE SES "RAISONS" ! Et quand on cherche, on trouve.
2 le mot "déclenché" traite le meurtre le plus atroce qui soit comme s'il s'agissait d'un phénomène mécanique NORMAL hors toute responsabilité du meurtrier (une bombe dont on déclenche accidentellement le détonateur.)
3 : un "geste" shunte l'horreur et son EXÉCUTEUR.. et la "destruction d'une famille" ne s'attache qu'à ses conséquences... en les restreignant tout en faisant mine de les étendre : la "destruction d'une famille"? (non, d'une femme et de l'enfant qu'elle portait.)
4 : De pire en pire : la mise dos à dos de la victime et du meurtrier tourne à l'obscène : le petit garçon "qui a perdu (!) sa maman" ... et "dont le père RISQUE (!) d'être conduit en détention".. (!) Là, on est presque dans l'espoir qu'il soit épargné (!) pour minimiser la souffrance de l'enfant qui a déjà "perdu sa maman"..
5 : et surtout, le plus terrible, la chute : le mot "RISQUE" ! (comme si après une telle horreur, il pouvait en être autrement). Avec ce qu'il implique de compassion devant un danger qui menace et qu'on ne saurait lui éviter (il risque sa vie etc.)
Note : après cela, on comprend mieux qu'une balle tirée sur une femme de 67 ans, juste atteinte au bras (soit dit sans la moindre ironie), n'intéresse apparemment personne.
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C'est à la manière dont la violence contre les femmes, fût-elle extrême, est traitée dans des médias que l'on peut prendre sa mesure en fonction des différents endroits où elle s'exerce; les quelques lignes de l'article sont significatives : en un sens, elles LA CONTIENNENT ELLE-MÊME EN GERME, RÉVÈLENT SON IMPORTANCE (CAUSE ET CONSÉQUENCE), donnent le "la" du diapason, expliquent pourquoi des violences mineures sont carrément shuntées.
1 le mot "RAISONS" sous-entend qu'il y a une "cause" RELIÉE aussi À LA VICTIME ainsi mise dos à dos avec son étrangleur. Des raisons!
2 le mot "DÉCLENCHÉ" traite le meurtre comme s'il s'agissait d'un phénomène mécanique hors toute responsabilite du meurtrier (une bombe qu'on déclenche accidentellement par un choc sur le détonateur.)
3 : le meurtre par étranglement d'une jeune mère enceinte devient platement le "GESTE" (!) ce qui shunte à la fois son horreur et surtout son EXÉCUTEUR.. pour ne sattacher qu'à ses conséquences, dites "la destruction d'une famille". (Une FAMILLE !) On noie le poisson.
4 : la mise encore une fois dos à dos de la victime et de son meurtrier : l'enfant "qui a PERDU (!) sa maman" ... et "dont le père RISQUE (!) d'être conduit en détention"... (!)...
5 : là, c'est l'apyre : " il "RISQUE" (!!) comme si, après une telle abomination, LA QUESTION POUVAIT MÊME SE POSER. "II risque" est d'autre part une expression qu'on emploie pour désigner le souci. L'ensemble de la phrase donne l'impression que l'on est quasiment dans le souhait, évidemment sans espoir, que cela lui soit épargné (!) pour le petit qui a déjà "PERDU sa maman".. perdu!
On comprend à cette lecture que de tels "gestes", forcément, augmentent. Ils sont révélés, commencent, prennent leur source et s'accroissent dans les mots qui les relatent et les font marcotter. Maladresse de journaliste? Sans doute mais cela ne change rien : si pour un tel sujet, on a envoyé un maladroit, c'est également significatif.
Insultes dites incivilités, crimes dits gestes ou dérapage et l'horreur toilettée pour devenir drame passionnel...
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